49

 

L’instant d’après, il lança sa monture au triple galop sur les traces de la Géante. Celle-ci n’avait pas une très grande avance sur lui, mais il devait la rattraper avant qu’elle ne regagnât son navire amiral, où étaient entreposées les bombes. Il savait à présent qu’elle n’hésiterait pas à se détruire elle-même pour anéantir ses ennemis.

 

Tlazol avait compris que la cause des Serpents était perdue. Ophius ne parviendrait pas à vaincre Kronos et Rhéa ; quant à Eris, elle ne pourrait s’opposer à Athor. Il ne lui restait plus qu’une solution : faire exploser les pierres de feu, détruire Avallon, comme elle l’avait fait pour Atlantis.

Une onde de haine coulait vers Astyan, comme la trace d’une odeur mentale funeste laissée par la Déesse des ordures. La bave d’une limace monstrueuse, une créature immonde qu’il devait abattre à tout prix. Projetant son esprit vers l’avant, il devina la silhouette de Tlazol, éperonnant sa monture jusqu’au sang afin de gagner au plus vite Doïra, où se trouvait son navire amiral.

S’il parvenait à transmuter le métal infernal avant qu’elle ne pût l’utiliser… Mais il était incapable de se concentrer efficacement. Le brouillage psychique de la Géante lui interdisait toute action mentale. Il fallait pourtant trouver une solution.

La petite cité se trouvait à plus de six angles de Poséidonia. Aucun cheval ne tiendrait une telle distance à l’allure où il poussait le malheureux animal.

Soudain un parti ennemi d’une vingtaine de guerriers se dressa devant lui pour lui interdire le passage. Mal leur en prit : il projeta sur eux une onde de fureur telle que leurs corps éclatèrent sous l’impact de sa colère.

Astyan poursuivit sa route à bride abattue. Tout autour, il devinait les corps mutilés de guerriers atlantes, mêlés à ceux des habitants de Doïra qui n’avaient pu échapper aux envahisseurs. Les atrocités qu’il percevait ne contribuaient pas à calmer sa fureur. Mais il devait vaincre, arrêter l’holocauste effroyable que la déesse maudite s’apprêtait à commettre.

La nuit était tombée à présent. Entre ses cuisses, il sentait que son cheval commençait à donner des signes de fatigue. Tlazol quant à elle avait pu changer de monture, grâce aux relais qu’elle avait laissés derrière elle. Cette hyène avait tout prévu, y compris un repli stratégique.

Il fallait qu’il se calmât. Il ralentit l’allure, se concentra pour réfléchir. Et la solution lui apparut : une idée, un pouvoir qu’il n’utilisait que rarement. Peu à peu il s’intégra, se fondit au corps du cheval, comme s’il faisait partie intégrante de sa propre chair.

Tout à coup, sous l’impulsion irrésistible de la volonté du Titan, le cheval s’éleva au-dessus du sol et se mit à voler, porté par la puissance de lévitation d’Astyan. Une sensation enivrante s’empara du demi-dieu. Il filait à présent aussi vite que le vent, dans une pénombre quasi totale, qu’éclairait seulement une lune intermittente, devant laquelle passaient des nuages sombres aux lisières éclaboussées d’argent. Il ne faisait plus qu’un avec l’animal.

Il parvint ainsi en bordure du plateau dominant la cuvette au fond de laquelle s’étendait Doïra. À mi-chemin du port, il distingua la silhouette de Tlazol qui dévalait la piste en lacets. Focalisant sa puissance de lévitation, il lança sa monture dans le vide, puis se laissa planer vers les quais. Il atterrit au milieu d’un groupe de guerriers ennemis éberlués, qui ne surent comment réagir. L’un d’eux, plus courageux, saisit un lance-éclairs. Mais Astyan s’enveloppa aussitôt d’une protection mentale et projeta une décharge d’énergie contre l’homme. L’arme lui explosa dans les mains. Une onde imparable rejeta tous les guerriers en arrière, comme le vent couche les blés. Effrayés, ils s’enfuirent. Astyan sauta à bas de sa monture.

L’instant suivant, Tlazol déboula en trombe de la cité en ruines et aperçut sa haute silhouette. Elle demeura un instant interdite, puis faillit s’étrangler de rage.

— Tu as osé me fuir ! rugit le Titan. Aurais-tu peur de me combattre ?

La Déesse des ordures éclata d’un rire terrible. Un éclat insoutenable brillait dans son œil unique. Elle s’exclama :

— J’ai déjà tué six demi-dieux à moi seule. Je peux en tuer un septième. Tu ne m’empêcheras pas d’anéantir l’Atlantide.

Elle dégaina son épée d’orichalque et se rua sur lui. Il para le coup avec une violence inouïe. Désarçonnée, la Géante glissa de son cheval et chuta sur le sol. Elle se releva, écumant de fureur.

Alors un combat terrifiant s’engagea au milieu des ruines fumantes où pesait encore l’odeur des chairs calcinées. Astyan devait absolument éviter de laisser la haine le dominer ; il savait à présent que c’était elle qui avait empêché Woodian de vaincre Tlazol. La Géante n’était qu’un être abominable qu’il devait détruire sans aucune pitié, mais aussi sans passion.

Très rapidement, il comprit qu’elle était la plus dangereuse adversaire qu’il eût jamais rencontrée. Elle possédait une expérience redoutable du maniement des armes. Tlazol luttait pied à pied. Mais Astyan ne ressentait aucune fatigue. Habité par une froide détermination, il frappait avec une précision foudroyante. L’autre parait tous ses coups. Peu à peu cependant, elle recula. Un début de désarroi se lut dans son œil unique. Les ondes d’énergie émanant de l’esprit des deux divinités venaient percuter les édifices encore debout, achevant de les détruire. La plupart des guerriers avaient fui, épouvantés par la tension qui vibrait dans l’air. L’atmosphère de la nuit, seulement éclairée par la lune et les lueurs des derniers incendies, avait pris la consistance de la poudre. Déjà de multiples blessures avaient entamé la chair de la Déesse des ordures.

Soudain une douleur aiguë mordit l’épaule d’Astyan. Il n’avait pourtant reçu aucun coup de la part de la Géante. Puis il comprit que l’un des guerriers l’avait frappé lâchement dans le dos. Il pesta contre lui-même : il aurait dû se méfier. Au prix d’un effort surhumain, il se retourna et concentra son énergie sur l’homme qui lui avait planté une lance dans l’omoplate. L’individu fut projeté avec une force imparable contre un pilier où son corps s’écrasa, les os broyés par l’impact. Astyan n’eut que le temps d’esquiver une nouvelle attaque de Tlazol, bien décidée à profiter de son avantage. Il para le coup et riposta. Les yeux de la déesse s’ouvrirent sur une stupéfaction sans bornes : elle venait de s’empaler sur l’épée d’orichalque de son adversaire.

Furieuse, elle empoigna la lame à pleines mains et la retira lentement de son corps, le visage tordu par la souffrance. Épuisé, Astyan la vit tituber, puis reculer et se diriger d’un pas lourd vers son navire. La douleur qui lui vrillait le dos lui interdisait tout mouvement.

Quelques guerriers s’approchèrent, brandissant lances et épées, afin de l’achever. Mais la puissance mentale du Titan demeurait intacte. Il se redressa et projeta sur eux une onde létale qui déchiqueta les corps des plus proches. Les survivants détalèrent sans demander leur reste.

Cependant Tlazol avait disparu. Affaibli par la douleur lancinante qui lui dévorait l’épaule, Astyan se dirigea vers le navire amiral. Devant ses yeux, les silhouettes sombres des vaisseaux semblaient se déformer, onduler. Mais il ne devait pas céder. Il se concentra pour isoler la souffrance, puis reprit sa progression et franchit l’échelle de coupée. Malgré l’obscurité, il percevait les lieux, le pont, les coursives. L’ombre de la déesse maudite qui se traînait vers les soutes, les mains crispées sur son ventre. Elle savait qu’il ne lui restait que peu de temps avant de mourir – il lui avait ouvert l’abdomen. Mais la rage la maintenait en vie. Il accéléra le pas. Un homme se dressa devant lui, puis s’écarta en lui soufflant :

— Ne me tue pas, Seigneur. Elle est devenue folle. Elle va tous nous anéantir.

Chancelant, Astyan le repoussa, puis se dirigea vers les ponts inférieurs. Au prix d’un effort colossal, il parvint dans la soute où dormaient les pierres de feu au moment où Tlazol posait la main sur la première d’entre elles. Il ressentit presque physiquement la concentration psychique de la Géante. Alors il comprit ce qu’elle voulait faire. Elle tentait de dissocier les atomes instables du métal vivant pour les faire exploser. Déjà une lueur verte naissait autour du long tube noir.

— Puisses-tu être à jamais maudite des dieux, immonde créature ! cracha-t-il.

Tlazol se tourna d’un bloc vers lui et lui adressa un regard de haine. Alors Astyan projeta d’un coup toute sa puissance sur le corps affaibli de la déesse. Elle tenta de résister, mais la puissance du Titan était imparable. La créature immonde explosa littéralement sous l’impact.

Astyan ne perdit pas une seconde. Il savait que la réaction atomique était amorcée. Il se concentra sur l’uraan. Il n’était que temps. Oblitérant sa souffrance, il s’intégra à la matière, la domina, la contrôla, puis opéra la transmutation. Enfin, épuisé, il sombra un instant dans l’inconscience. Les quatre bombes n’étaient plus que d’énormes blocs de plomb inoffensifs.

Lorsqu’il recouvra ses esprits, un homme se tenait devant lui – le guerrier qui lui avait laissé le passage.

— Tu as triomphé, Seigneur ! Je suis le commandant de la garnison que Tlazol a laissée à Doïra. J’ai ordonné à mes hommes de baisser les armes. Nous sommes tes prisonniers.

Astyan se redressa.

— Je te promets qu’il ne te sera fait aucun mal.

 

L’aube se levait à peine lorsque Astyan regagna Poséidonia. Partout, les Serpents avaient cessé le combat. De longues colonnes de prisonniers défilaient dans les artères principales, sous la garde vigilante des guerriers de l’Empire.

Les yeux rougis par la fatigue, Astyan se dirigea vers la ville basse. Au loin la flotte de Kronos et de Rhéa avait submergé celle d’Ophius. Pris entre les feux des navires poséidoniens, qui avaient repris la mer sous la direction de Païdras, aux commandes de l’Hedreen, et l’escadre des deux Titans, l’ennemi avait été décimé, puis acculé sur les hauts-fonds, où s’entassaient encore les épaves calcinées des vaisseaux de Taenghu et de Khali.

Une épaisse fumée recouvrait la ville comme un brouillard. Ce fut dans cette atmosphère d’apocalypse qu’Astyan vit surgir une silhouette hagarde qui tenait dans la main une masse sanglante. Athor, le corps couvert de sueur et de boue, jeta aux pieds de son compagnon la tête exsangue d’Eris, qu’il avait vaincue en combat singulier.

— Tout est fini, mon frère, dit-il. Nous avons triomphé de la Bête.

Lui-même souffrait d’une vilaine balafre à la joue. Partout, dans tous les quartiers de la cité, les Serpents rendaient les armes. Seuls quelques obus continuaient de déchirer l’air océanique. Mais la bataille s’acheva vers le milieu de la journée. Plus de la moitié de la flotte ennemie avait été coulée. Les uns après les autres, les bâtiments de la Ligue capitulaient.

Au début de l’après-midi, un navire qu’Astyan connaissait bien pénétra dans le port, encombré par les carcasses des vaisseaux coulés. Il parvint néanmoins à se ranger le long d’un quai intact. Kronos et Rhéa en descendirent. Astyan, qui les attendait, leur tomba dans les bras. Les trois Titans s’étreignirent longuement.

— Ophius ? demanda Astyan.

— Mort ! répondit Kronos. Il a tenté de s’enfuir lorsqu’il nous a vus arriver. Je me suis lancé à sa poursuite. J’ai pris son bateau à l’abordage, et je l’ai affronté. Un adversaire redoutable. Mais je l’ai tué.

Il eut un sourire en coin, puis éclata de rire.

— Je n’allais tout de même pas te laisser le soin de massacrer toutes ces abominations tout seul, non ?

Astyan le serra avec affection dans ses bras. Lorsque Kronos s’écarta de lui, il constata que sa main était pleine du sang de son ami.

— Tu es blessé ?

— Un cadeau de Tlazol. Rassure-toi, elle aussi a rejoint Ophius. Pour moi, ce ne sera rien. Mais heureusement que vous êtes arrivés, Rhéa et toi. Je ne sais pas si j’aurais eu la force d’en affronter encore un autre. Maintenant, explique-moi ! Comment se fait-il que tu aies pu constituer une flotte aussi nombreuse ?

— C’est simple. Après notre fuite d’Hespérya, j’ai établi un brouillage mental afin de protéger notre peuple, que j’ai envoyé vers Atalaya. Je savais qu’Amenti serait elle aussi touchée par le nuage radioactif, mais qu’Asgarth serait vraisemblablement épargnée, en raison de son éloignement. J’ai donc ordonné à tous les navires de se diriger là-bas. J’avais compris que l’ennemi concentrerait son effort sur Poséidonia. Alors j’ai utilisé mon aéroglisseur pour me rendre dans les ports des autres royaumes, et j’ai demandé aux argontes de me confier le commandement de tous les navires de guerre disponibles. C’est ainsi que j’ai réuni une flotte composée de vaisseaux en provenance de Saïqarah, d’Amenti, de Delphes, et d’Akhêna. Ajoutés aux cinquante navires dont je disposais déjà, cela représentait une solide armada. Mais il nous fallait le temps d’arriver jusqu’ici. Lorsque j’ai aperçu les incendies qui ravageaient Poséidonia, j’ai redouté d’arriver trop tard. Heureusement, vous résistiez toujours.

— Et tu nous as permis de vaincre.

— Oh, je suis sûr que tu y serais parvenu tout seul ! Cet Ophius n’aurait pas pesé lourd devant toi.

Rhéa s’avança et demanda, un peu gênée :

— Anéa ?

Astyan la regarda, puis répondit :

— Je n’ai plus aucune nouvelle depuis plusieurs jours. Elle est partie combattre sa sœur, Ashertari. Avec seulement deux cents guerriers contre trente mille.

— C’est de la folie.

— Elle avait un plan. Je n’ai rien pu faire pour la détourner de son idée. Cependant il semble bien qu’elle ait réussi, sinon les guerriers de cette maudite Ashertari seraient déjà là.

Il se concentra et tenta une nouvelle fois d’entrer en contact avec sa compagne. Sans résultat.

— J’ignore ce qui se passe. Sans doute se protège-t-elle pour éviter de se dévoiler.

Lentement le cortège des Titans remonta vers le centre de la ville. De partout surgissaient des gardes, de simples civils armés de lances, de lance-éclairs de chasse, des hommes et des femmes hagards, qui avaient peine à admettre que le cauchemar venait de prendre fin.

Certes, on avait remporté la victoire, mais son prix avait été très lourd. La moitié de la ville avait été endommagée par les tirs des canons à longue portée d’Ophius. En divers endroits, des incendies avaient détruit des demeures, des magasins, des cirques, des temples. D’innombrables cadavres jonchaient les dalles des artères, ennemis et alliés, fraternellement réunis dans la mort.

Comme si les éléments avaient voulu se mêler au soulagement des hommes, la tempête qui avait sévi depuis près de deux lunes s’était éloignée vers l’est. Un soleil magnifique inondait la cité d’une lumière éblouissante.

Astyan et ses compagnons se dirigèrent vers le palais des Orchidées. S’il n’avait tenu qu’à lui, il serait déjà parti pour le Nord, afin de porter secours à Anéa. Mais il devait d’abord réunir le collège des argontes.

Ce fut au moment où il parvenait sur l’Agora que l’écho d’une explosion lointaine se fit entendre. On regarda d’abord vers l’océan : peut-être un vaisseau de la Ligue se défendait-il encore ? Mais Rhéa montra, au loin vers le nord, une colonne nuageuse qui s’élevait vers le ciel avec une lenteur majestueuse.

Astyan pâlit et murmura :

— L’Héphaïs ! Il vient d’exploser !

L'Archipel Du Soleil
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